La mue de Twitter galvanise la concurrence

Les déçus de Twitter trouvent refuge sur plusieurs plateformes concurrentes.

Le propriétaire de Twitter multiplie les initiatives pour monétiser les prestations de sa plateforme. Les déçus de cette nouvelle orientation se tournent vers d’autres réseaux sociaux émergents.

Depuis qu’Elon Musk est devenu acquéreur de Twitter (octobre 2022), tout est mis en œuvre pour rendre payante toute activité offerte par le réseau social de San Francisco. Le milliardaire a introduit des changements majeurs sur la plateforme de microblogging dont les formules d’abonnements modulables, donnant accès à du contenu exclusif. En outre, les abonnés ayant payé l’abonnement disposeront d’un badge supplémentaire pour être reconnaissables lorsqu’ils interagissent avec le compte auquel ils ont souscrit. Cette offre permet à Twitter de retenir 3 % jusqu’à ce que le palier des 50 000 dollars soit atteint. Au-delà de cette somme, les frais s’élèvent à 20 %.

L’autre mesure qui défraie la chronique est la disparition de la coche bleue (Twitter Blue) pour des milliers de comptes qui avaient été vérifiés selon l’ancienne méthode. Avant la prise de contrôle par Elon Musk, le badge bleu était un privilège réservé aux personnes répondant à certains critères définis par Twitter. Désormais, tout le monde peut acheter la fameuse pastille en payant 8 dollars par mois. La nouvelle formule d’abonnement est présentée comme un moyen d’améliorer la visibilité des comptes qui en bénéficient.

Pour beaucoup d’utilisateurs mécontents, l’offre payante imaginée par le milliardaire n’est rien d’autre qu’un tunnel contraignant qui oblige les abonnés à payer un service dont ils ne voient pas l’utilité. De nombreux commentateurs n’hésitent pas à qualifier la nouvelle politique de certification de tiroir-caisse destiné uniquement à augmenter les revenus de l’entreprise.

Selon plusieurs experts, Twitter perd chaque jour un grand nombre d’abonnés depuis la mise en œuvre de la nouvelle politique de certification. Les déçus de Twitter trouvent refuge sur plusieurs plateformes concurrentes qui s’empressent de proposer les prestations que la plateforme à l’oiseau bleu abandonne.

Mastodon

Mastodon est le plus grand bénéficiaire des transfuges de Twitter. Ce réseau de microblogging décentralisé et auto-hébergé se définit comme un espace libre et open source, qui ne dépend pas d’une entreprise et qui ne diffuse pas de publicités. Il fonctionne grâce à un ensemble de serveurs indépendants (Fediverse) qui peuvent communiquer entre eux grâce au protocole ActivityPub.

Mastodon a la particularité de permettre aux utilisateurs de rejoindre un serveur parmi les quelque 3 300 disponibles dans le monde. On peut s’inscrire selon ses centres d’intérêts (technologies, jeux vidéo, cuisine, sport, art…) ou des critères géographiques. La création d’un compte avec un identifiant et un mot de passe qui est associée au serveur choisi et non à une plateforme unique contrôlée par une seule entreprise. Si l’internaute n’aime pas le comportement des personnes qui gèrent ce serveur ou qu’il pense qu’elles modèrent le contenu de manière trop stricte, il peut s’en aller et migrer avec ses suiveurs et tout son réseau vers un autre système.

Outre le choix du serveur (instance), l’utilisateur peut aussi suivre et interagir avec des utilisateurs d’autres instances. Les messages sur Mastodon sont appelés « pouets » (ou toots en anglais) et peuvent contenir jusqu’à 500 caractères, des images, des vidéos ou des sondages.

Cependant Mastodon peine encore à rivaliser avec Twitter à cause de sa charte graphique d’un autre temps. La première impression de nombreux internautes qui visitent la plateforme est rarement positive.  Ils le jugent complexe et inaccessible à toute personne peu habituée aux nouvelles technologies.

BlueSky

Lancé en 2019 par le cofondateur de Twitter, Jack Dorsey, Bluesky se veut un réseau social décentralisé, semblable à celui de Mastodon. Il est basé sur des standards ouverts. Ayant véritablement pris son envol en 2021, il offre aux utilisateurs le choix de leur propre service d’hébergement, leur propre interface et leur propre algorithme pour accéder au contenu.

BlueSky a vocation à faciliter faciliter l’interopérabilité entre différents services et applications. Cela veut dire qu’il est possible de créer des applications distinctes au sein de Bluesky et que tous les contenus échappent au contrôle d’une entité unique.

Axé sur le texte, BlueSky permet aux utilisateurs de publier des messages courts de 300 caractères, ainsi que des photos. Les vidéos et les messages directs ne sont pas encore pris en charge.

Lancée en février dernier sur le système d’exploitation iOS d’Apple et fin mars sur Android, l’application de Bluesky a été téléchargée plus de 375 000 fois sur iOS dans le monde entier la semaine dernière et pointe actuellement devant quelques plateformes populaires comme LinkedIn, Bing ou Zoom dans le classement de la boutique Apple, l’App Store.

Bien que sa base d’utilisateurs soit encore petite, Bluesky a attiré de nombreux utilisateurs importants, suivis par des millions de followers, dont l’écrivain et comédien Dril, l’activiste Jordan Uhl, la parlementaire Alexandra Ocasio-Cortez et l’actrice Chrissy Teigen. Bluesky attire principalement des journalistes, des personnalités et des experts travaillant dans le secteur digital. Plus d’un million de personnes seraient actuellement sur liste d’attente pour s’y inscrire.

Cependant, il n’y a toujours pas de processus de vérification sur Bluesky, ce qui signifie que les usurpateurs d’identité ont déjà commencé à apparaître. Ces derniers jours, des comptes de trolls se faisant passer pour l’auteur J.K. Rowling et le propriétaire de Twitter Elon Musk ont émergé sur la plateforme.

Twitter chute lourdement dans le classement des réseaux sociaux les plus populaires.

Medium

Plateforme de blogging minimaliste conçue pour des textes longs, Medium permet aux utilisateurs de créer et de lire des articles sur divers sujets. Créé par Evan Williams, le fondateur de Twitter, Medium est apprécié par des internautes attachés à la liberté d’expression. Il offre en effet un format qui permet d’exprimer ses idées, ses opinions ou ses expériences sans contrainte.

Le site se définit comme un espace de prise de parole des personnes qui ont quelque chose d’intéressant à dire, même si elles n’ont pas des milliers de followers sur Twitter ou qui ont un réseau constitué de célébrités influentes. Le média a été conçu pour récompenser le contenu en fonction de sa qualité, et non du pedigree ou de la popularité de l’auteur.

Medium a subi beaucoup de modifications de son modèle d’affaire depuis 2012. En 2014, la plateforme a mis l’accent sur des publications sponsorisées. Puis, en 2017, elle a lancé un abonnement à 5 dollars pour donner un accès à la totalité de son contenu.

À partir de 2020, Medium s’est jeté dans la bataille pour se faire une place dans le créneau des newsletters. En 2021, une énième modification de la direction donnait cette fois-ci la priorité aux ventes des ebooks et aux podcasts éducatifs via le rachat de Knowable.

Medium propose aussi un système d’abonnement payant qui permet aux auteurs de monétiser leurs articles et aux lecteurs d’accéder à des contenus exclusifs. Ce réseau est donc une alternative à Twitter pour ceux qui veulent partager ou lire des textes plus longs et plus approfondis que des tweets.

Medium dispose d’un programme de partenariat qui peut permettre aux auteurs d’obtenir un revenu d’appoint intéressant, voire un revenu à temps plein, à condition de remplir certains critères d’éligibilité.

Mais la plateforme a un inconvénient majeur : elle est propriétaire exclusive du contenu. Si, pour une raison quelconque, elle estime qu’un texte n’est pas conforme à ses critères, elle peut le supprimer immédiatement.

Post

Nouvelle trouvaille de l’ancien PDG de Waze, Noam Bardin, Post veut offrir aux utilisateurs de vivre l’expérience de Twitter des débuts, avec la possibilité d’avoir de vraies interactions entre abonnés. Ils peuvent publier des messages de n’importe quelle longueur et commenter, liker, partager et reposter le contenu des autres abonnés, en toute liberté.

Les administrateurs insistent régulièrement sur la philosophie de leur plateforme :  les utilisateurs ont le droit de s’exprimer librement sur tous les sujets mais ont l’obligation d’être avenants et faire preuve d’intelligence en exposant leurs idées.

Post n’est pour l’instant qu’en version bêta et n’a pas révélé le nombre de ses utilisateurs, mais sa liste d’attente compte désormais plus de 125 000 personnes, selon le journal Axios.

Le réseau offre aussi la possibilité d’acheter des articles individuels produits par les grands médias, de les lire sans aller sur leurs sites web et de donner son avis aux créateurs de contenu. Le réseau social mise aussi sur une modération stricte avec l’aide de sa communauté, inspirée du modèle collaboratif de Waze.

Substack Notes

Créé en 2017, Substack Notes est une fonctionnalité de la plateforme Substack, spécialisée dans la création de newsletters. Cet outil a pris son essor pendant le confinement. Il ne cesse de croître au point d’être la plateforme préférée de plus de 250 000 abonnés. Un nombre appréciable pour une plateforme payante.

Substack Notes permet aux rédacteurs de partager avec la communauté Substack des réflexions rapides et des extraits de bulletins d’information. Contrairement aux articles traditionnels envoyés aux abonnés par courrier électronique, les « Notes » sont publiées directement sur la plateforme Substack, et les lecteurs n’ont pas besoin de s’inscrire à une newsletter pour les consulter.

Les notes aident les auteurs à attirer de nouveaux abonnés et à développer leur audience et leurs revenus en facilitant l’accès de leur travail à des nouveaux lecteurs au sein du réseau Substack. Les publications sont également utiles pour créer des liens entre les communautés et susciter des conversations.

Il est à noter que la plateforme est exempte de publicité, Substack générant ses revenus à partir des abonnements.

Les notes sont similaires aux tweets en ce sens qu’il s’agit de courts messages, partagés publiquement sur la plateforme. Les lecteurs peuvent liker, « restacker » (similaire à un retweet) et commenter les notes, tout comme ils le feraient pour un tweet.

À l’instar de Twitter, Substack Notes dispose également de deux flux : le flux « Accueil », qui affiche les notes de tous les rédacteurs de la plateforme, et le flux « Abonnés », qui n’affiche que les notes des rédacteurs auxquels l’on est abonné.

La liste n’est pas exhaustive. Plusieurs autres alternatives à Twitter existent. Dans cet univers ultra-compétitif, seules les plus dynamiques émergeront et s’imposeront sur une Toile dopée par la mise en circulation d’outils IA puissants.

Carrefour-Soleil

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