Le travail de la coalition des ONG actives dans la Campagne internationale pour l’abolition des armes nucléaires (ICAN) a retenu l’attention du Comité Nobel norvégien cette année.
Pour justifier son choix, le Comité souligne les efforts de l’ICAN pour convaincre les États membres des Nations unies à adopter cette année un traité d’interdiction de l’arme atomique. Ceci, alors même que les puissances nucléaires connues sont restées indifférentes, voire hostiles à cette initiative.
Le traité proposé par l’ICAN a été adopté par 122 pays le 7 juillet à l’ONU. Il interdit le développement et le stockage des armes nucléaires. Sa portée devrait cependant rester essentiellement symbolique, puisque les puissances nucléaires ont toutes refusé d’y adhérer. L’Organisation du traité de l’Atlantique nord (OTAN) l’a condamné, en invoquant notamment la «grave menace» nord-coréenne.
«Nous vivons dans un monde où le risque que les armes nucléaires soient utilisées est plus élevé qu’il ne l’a été depuis longtemps», a déclaré la présidente du Comité Nobel, Berit Reiss-Andersen, lors de la présentation de l’organisation lauréate, ce vendredi. C’est évidemment un message au président américain qui menace de rayer la Corée du Nord de la carte. Kim Jung Un, le leader de ce pays est également interpellé pour son acharnement à perfectionner son arsenal nucléaire.
Mme Reiss-Andersen a également précisé que « le Comité Nobel est conscient qu’une interdiction juridique internationale n’éliminera pas en soi la possession d’armes nucléaires et que, jusqu’à présent, ni les États qui ont déjà des armes nucléaires, ni leurs alliés les plus proches ne soutiennent le traité d’interdiction d’arme nucléaire. »
Efforts de millions d’activistes et de citoyens inquiets
Du côté de l’ICAN, à Genève, cette distinction est accueillie avec enthousiasme : «Le prix est une reconnaissance des efforts de millions d’activistes et de citoyens inquiets à travers le monde qui, dès le début de l’ère nucléaire, ont protesté avec force contre les armes nucléaires en insistant qu’elles ne poursuivent aucune finalité légitime et qu’elles doivent être éradiquées à tout jamais de la planète», a déclaré Beatrice Fihn, la directrice de l’ICAN.
En plus de la reconnaissance de son engagement antinucléaire depuis une dizaine d’année, le prix Nobel apporte plus de moyens financiers (943 000 euros environ) à cette coalition d’ONG, soutenue par un bataillon de bénévoles.
Depuis sa création en 2007, l’ICAN œuvre auprès des Nations unies dans le but de faire prendre conscience aux États membres des conséquences néfastes d’une course à la construction et au perfectionnement des armes nucléaires.
Son message est entendu et respecté – même dans le camp des puissances nucléaires – grâce à la présence dans ses rangs de personnalités comme Desmond Tutu (ancien prix Nobel de la paix), le dalaï lama, Yoko Ono, Martin Sheen et bien d’autres.
Neuf Etats détiennent aujourd’hui la quasi-totalité de l’arsenal nucléaire: les États-Unis, la Russie, la France, la Grande-Bretagne, la Chine, l’Inde, le Pakistan, la Corée du Nord et Israël. C’est l’équivalent de 9400 ogives, selon les estimations du Bulletin of the Atomic Scientists (BAS). Il y a de quoi détruire plusieurs fois tous les êtres vivants de la terre.
Ce n’est pas la première fois que le comité Nobel récompense les acteurs de la dénucléarisation du monde. Il a primé Andreï Sakharov en 1975, l’Association internationale des médecins pour la prévention de la guerre nucléaire en 1985, Joseph Rotblat et le mouvement Pugwash en 1995, ainsi que l’Agence internationale de l’énergie atomique (AIEA) et son directeur d’alors Mohamed El-Baradei en 2005.
Carrefour-Soleil
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