République centrafricaine: Un nouveau président et mille défis
Faustin-Archange Touadéra est déclaré vainqueur du second tour de l’élection présidentielle centrafricaine face à Anicet-Georges Dologuélé. Il a recueilli 62,71% des suffrages contre 37,29% pour son rival. Le scrutin a mobilisé plus de 80% de l’électorat de ce pays d’Afrique centrale peuplé de 4,6 millions d’habitants.
Le nouveau président, dernier premier ministre de François Bozizé renversé en mars 2013, semble être l’homme du consensus entre différentes factions politiques à l’origine des troubles qui secouent le pays depuis presque trois ans. Il s’est présenté en candidat indépendant à cette élection qui a vu la participation de trente prétendants.
Cette étiquette lui a permis de rassembler sous sa bannière une bonne frange des battus du premier tour et leurs électeurs. A l’arrivée, il n’y a pas eu de contestation notable des résultats. Pas de trouble postélectoral, non plus. Et son rival a tout de suite reconnu sa défaite même si son camp a évoqué « quelques irrégularités». Un émissaire de l’ONU présent à Bangui a exprimé son étonnement face au déroulement paisible du processus électoral. « Une élection présidentielle sans cris de colère des candidats malheureux, c’est rare en Afrique », a-t-il souligné.
Les Centrafricains n’en peuvent plus de vivre dans un pays géré au pifomètre par un exécutif de transition usé par d’incessantes querelles. « Nous avons beaucoup souffert dans notre pays. Trois ans de crise, c’est long. Nous voulons le changement, nous voulons la paix.» Tels sont les propos d’un électeur recueillis par l’équipe de presse du Programme des Nations Unies pour le développement (PNUD). Un avis que partage beaucoup d’habitants de ce pays de 623 000 km2. Classé au 187ème rang mondial (sur 188) de l’Indice de développement humain (IDH) malgré un sol et sous-sol exceptionnellement riches.
Privé d’état de grâce
Faustin-Archange Touadéra n’aura pas droit à l’état de grâce. Il sait d’ores et déjà que son peuple attend des résultats immédiats. Aussi ne s’est-il pas facilité la tâche en promettant beaucoup lors de son discours de victoire, où il a évoqué la prospérité et la création d’emplois. Autre difficulté : il devra gouverner avec différents leaders politiques qui ont soutenu sa candidature mais pas forcément son programme.
Les conflits ethniques ne sont pas éteints et n’attendent qu’une étincelle pour embraser Bangui, la capitale, et d’autres villes convoitées par les groupes armés. Ces groupes pullulent et se déploient au Nord et à l’Est, parties du territoire particulièrement exsangues, où les fonctions régaliennes de l’État (police, justice, douane, extractions minières et perception des taxes) sont sources de rackets. Cinq-cent-mille Centrafricains (presque un quart de la population) croupissent dans les camps de réfugiés situés dans les pays voisins (Cameroun, Tchad, Congo, RDC). La liste des problèmes prioritaires à régler est longue.
Selon certains analystes, le nouveau chef de l’État devra rapidement apprendre le langage des institutions financières internationales. Un exercice indispensable pour espérer trouver le financement dont le pays a besoin pour redémarrage rapide du secteur productif, clé d’une reconstitution des capacités de mobilisation des ressources internes de l’État.
Frank Kodbaye
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