Un juge suspend le dernier décret migratoire de Donald Trump

Le Travel Ban de Donald Trump passe encore par la case justice. Photo: AP

A quelques heures de son entrée en vigueur, la troisième version du décret anti-immigration signée par le président américain le 24 septembre est bloquée par le juge fédéral Derrick Watson, basé à Hawaï. Il invoque le caractère discriminatoire de la décision présidentielle.

L’injonction de suspension prise par le juge Watson bloque de facto l’interdiction faites aux Yéménites, Syriens, Libyens, Iraniens, Somaliens et Tchadiens de franchir les frontières américaines. En revanche, le décret sera applicable aux ressortissants de la Corée du Nord et aux dirigeants vénézuéliens.

La troisième version du décret « souffre précisément des mêmes maux » que les moutures antérieures, selon le juge Watson. Il note que le texte de Donald Trump manque de conclusions suffisantes relatives au préjudice sur les intérêts américains dû à l’entrée de citoyens des pays visés.

Le juge Watson a motivé sa décision en précisant que le décret «effectue à l’évidence une discrimination fondée sur une nationalité», une éventualité proscrite par les «principes fondateurs de cette Nation».

Le juge a aussi souligné le choix incohérent de Donald Trump de sanctionner certains pays qui ont tout de même fait l’effort de collaborer pleinement avec son administration sur le terrorisme (la Somalie, par exemple) et d’épargner d’autres qui ne l’ont pas fait. C’est le cas de l’Irak.

Le juge Watson a bloqué la troisième version du décret anti-immigration en invoquant le caractère discriminatoire de certaines dispositions.
Photo: 123rf/David Carillet

L’annonce du jugement a bien évidemment plu aux organisations pro-immigration qui ont attaqué le décret. «Nous sommes heureux, mais pas surpris que le décret anti-musulman illégal et anticonstitutionnel du président Trump ait été bloqué une nouvelle fois», a commenté Omar Jadwat, l’avocat de l’Union américaine pour les libertés civiles (ACLU). Cette puissante organisation est opposée aux mesures anti-migratoires de Donald Trump depuis sa prise de fonction à la Maison-Blanche.

Après Hawaï, le décret controversé devra être examiné dans les prochains jours par des juges de l’État du Maryland et de Washington. Ils ont été saisis au même moment que leur collègue hawaïen.

Ce jugement « porteur d’erreurs dangereuses sape les efforts du président pour protéger la population américaine », a réagi la porte-parole de la Maison-Blanche, Sarah Huckabee Sanders. L’administration Trump compte faire rapidement appel, en s’appuyant sur les mêmes motifs de sécurité nationale martelés depuis le debut de la polémique.

Le nouveau blocage relance la bataille judiciaire devant les tribunaux et la Cour Suprême. Celle-ci avait annulé le 10 octobre dernier un arrêt d’une cour d’appel bloquant la version précédente du déret anti-immigration. Mais les enjeux sont dépassés autour de cette mouture du décret qui interdisait pendant 90 jours l’entrée des Etats-Unis aux voyageurs de six pays à majorité musulmane.

Donald Trump risque de traîner cette affaire sur plus de la moitié de son premier mandat à la tête des Etats-Unis. Elle prend déjà une place disproportionnée sur la liste de ses réformes.

Carrefour-Soleil

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Les étapes judiciaires du décret anti-immigration

Le décret anti-immigration de Donald Trump a connu trois versions toutes successivement suspendues par les tribunaux.

27 janvier 2017

Donald Trump publie son premier décret migratoire intitulée : « Protection de la nation contre l’entrée aux États-Unis de terroristes étrangers ». Le texte interdit le franchissement des frontières américaines pour trois mois aux citoyens de sept « pays musulmans » (Yémen, Syrie, Libye, Iran, Soudan, Somalie, Irak) et pour quatre mois aux réfugiés. Plusieurs États démocrates et associations saisissent la justice.

3 février 2017

Un magistrat fédéral de Seattle, James Robart, suspend l’application du décret au plan national. Une décision « ridicule » selon Trump, qui raille un « pseudo-juge ».

9 février 2017

La cour d’appel de San Francisco maintient la suspension du décret migratoire.

6 mars 2017

Le président signe une seconde version de son décret, qui interdit désormais pendant 90 jours l’entrée aux États-Unis aux voyageurs de six pays musulmans et non plus sept. L’Irak est retiré de la liste.

16 mars 2017

Un juge à Hawaï, bloque la deuxième version du décret migratoire. Un autre magistrat, dans l’État du Maryland, prend une décision similaire en estimant que le texte vise de façon discriminatoire les musulmans. Le gouvernement Trump annonce son intention de faire appel des jugements.

25 mai 2017

La cour d’appel de Richmond en Virginie confirme la suspension du décret migratoire

26 juin 2017

Saisie par la Maison-Blanche, la Cour suprême remet le décret partiellement en vigueur, tout en renvoyant à l’automne un jugement sur le fond. Le texte s’applique désormais vis-à-vis de quiconque « n’ayant pas établi de relation de bonne foi avec une personne ou une entité aux États-Unis » et venant de ces six pays majoritairement musulmans.

24 septembre 2017

Donald Trump signe un troisième décret qui interdit de façon permanente le franchissement des frontières américaines aux ressortissants de sept pays (Yémen, Syrie, Libye, Iran, Somalie, Corée du Nord et Tchad). Le texte suspend également l’entrée aux États-Unis de responsables gouvernementaux vénézuéliens.

17 octobre 2017

Un juge fédéral d’Hawaï suspend l’application de la dernière version du décret anti-immigration du président américain Donald Trump, quelques heures seulement avant son entrée en vigueur.

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